Labours et laboureurs d'autrefois vu par les poètes



Du 4 au 7 septembre de déroule à Saint-Jean d'Illac (Gironde) le championnat du monde de labours dans le cadre de la grande fête des Terres de Jim. Le temple de la modernité mécanique, de la nourriture, mais bien peu de poésie en perspective. Nous saisissons quant à nous l'occasion de porter un autre regard. Vers les temps qui étaient durs, mais qui inspiraient les poètes et même les ministres. Voici donc quelques textes choisis (ou rappelés)
Sully,ministre de Henri IV
"Labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France"
La Fontaine:le Laboureur et ses enfants
Travaillez, prenez de la peine :
C'est le fonds qui manque le moins.
Un riche Laboureur, sentant sa mort prochaine,
Fit venir ses enfants, leur parla sans témoins.
Gardez-vous, leur dit-il, de vendre l'héritage
Que nous ont laissé nos parents.
Un trésor est caché dedans.
Je ne sais pas l'endroit ; mais un peu de courage
Vous le fera trouver, vous en viendrez à bout.
Remuez votre champ dès qu'on aura fait l'Oût.
Creusez, fouiller, bêchez ; ne laissez nulle place
Où la main ne passe et repasse.
Le père mort, les fils vous retournent le champ
Deçà, delà, partout ; si bien qu'au bout de l'an
Il en rapporta davantage.
D'argent, point de caché. Mais le père fut sage
De leur montrer avant sa mort
Que le travail est un trésor.

Albert Samain:le laboureur
Mars préside aux travaux de la jeune saison ;
À peine l'aube errante au bord de l'horizon
Teinte de pâle argent la mare solitaire,
Le laboureur, fidèle ouvrier de la terre,
Penché sur la charrue, ouvre d'un soc profond
Le sein toujours blessé, le sein toujours fécond.
Sous l'inflexible joug qu'un cuir noue à leurs cornes,
Les bœufs à l'œil sanglant vont, stupides et mornes,
Balançant leurs fronts lourds sur un rythme pareil.
Le soc coupe la glèbe et reluit au soleil,
Et dans le sol antique ouvert jusqu'aux entrailles
Creuse le lit profond des futures semailles...
Le champ finit ici près du fossé bourbeux ;
Le laboureur s'arrête, et dételant ses bœufs,
Un instant immobile et reprenant haleine,
Respire le vent fort qui souffle sur la plaine ;
Puis, sans hâte, touchant ses bœufs de l'aiguillon,
Il repart, jusqu'au soir, pour un autre sillon.

Pierre Dupont: les boeufs
J'ai deux grands boeufs dans mon étable,
Deux grands boeufs blancs marqués de roux ;
La charrue est en bois d'érable,
L'aiguillon en branche de houx.
C'est par leur soin qu'on voit la plaine
Verte l'hiver, jaune l'été ;
Ils gagnent dans une semaine
Plus d'argent qu'ils n'en ont coûté.

S'il me fallait les vendre,
J'aimerais mieux me pendre ;
J'aime Jeanne ma femme, eh bien ! j'aimerais mieux
La voir mourir, que voir mourir mes boeufs.

Les voyez-vous, les belles bêtes,
Creuser profond et tracer droit,
Bravant la pluie et les tempêtes
Qu'il fasse chaud, qu'il fasse froid.
Lorsque je fais halte pour boire,
Un brouillard sort de leurs naseaux,
Et je vois sur leur corne noire
Se poser les petits oiseaux.

S'il me fallait les vendre,
J'aimerais mieux me pendre ;
J'aime Jeanne ma femme, eh bien ! j'aimerais mieux
La voir mourir, que voir mourir mes boeufs,
(etc.)

George Sand et le labour en préambule de la Mare au Diable
Je venais de regarder longtemps et avec une profonde mélancolie le laboureur d'Holbein, et je me promenais dans la campagne, rêvant à la vie des champs et à la destinée du cultivateur. Sans doute il est lugubre de consumer ses forces et ses jours à fendre le sein de cette terre jalouse, qui se fait arracher les trésors de sa fécondité, lorsqu'un morceau de pain le plus noir et le plus grossier est, à la fin de la journée, l'unique récompense et l'unique profit attachés à un si dur labeur. Ces richesses qui couvrent le sol, ces moissons, ces fruits, ces bestiaux orgueilleux qui s'engraissent dans les longues herbes, sont la propriété de quelques-uns et les instruments de la fatigue et de l'esclavage du plus grand nombre. L'homme de loisir n'aime en général pour eux-mêmes, ni les champs, ni les prairies, ni le spectacle de la nature, ni les animaux superbes qui doivent se convertir en pièces d'or pour son usage. L'homme de loisir vient chercher un peu d'air et de santé dans le séjour de la campagne, puis il retourne dépenser dans les grandes villes le fruit du travail de ses vassaux.

Lire également:la charrue à travers les âges
Samedi 30 Août 2014

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