Sébastien Guèze:Des montagnes ardéchoises aux sommets du succès


INTERVIEW-C'est un remplacement dans les contes d'Hoffmann qui l'avait révélé au public allemand. Le jeune ténor français triomphe cette fois à Bonn dans Jérusalem de Verdi. Confidences entre deux représentations



Sébastien Guèze:Des montagnes ardéchoises aux sommets  du succès
QUESTION- C’est un remplacement au pied levé, dans les contes d’Hoffmann, l’an passé, à Bonn, qui a accéléré votre reconnaissance par le public, en particulier allemand, grand connaisseur en la matière. C’était jouer quitte ou double ? (Voir l'article précédent)

Sébastien Guèze:Des montagnes ardéchoises aux sommets  du succès
  • SEBASTIEN GUEZE-
J’avoue que ce fut un peu un challenge. La nouvelle version donnée à Bonn était différente d’une soixantaine de pages avec celle que je venais de créer à Wiesbaden. Mais ma prise de rôle s’était tellement bien passée, c’était comme une révélation tant vocalement qu’au point de vue du jeu, sans doute le personnage le plus complet à jouer de tout le répertoire, aussi j’avais cette musique dans le sang depuis longtemps : c’est un de mes opéras préférés. Alors j’ai relevé le défi. En deux jours, j’ai appris la mise en scène et la musique. C’était très stressant, le soir de la première dès que je sortais de scène, j’en profitais pour relire mes notes sur les déplacements à effectuer, le texte des répliques à donner. Je cachais même ma partition dans le décor. Il y avait des moments où je n’avais aucune idée de ce que je devais dire, je me laissais entraîner par l’action et au dernier moment, logiquement, le texte me revenait. Heureusement ce genre de situation est exceptionnel. Aux saluts vous poussez un « ouf » de soulagement. La première fut sauvée, et le spectacle un grand succès ! Une histoire d’amour est née avec ce rôle.

Q- Comment vous est venue cette vocation pour le chant lyrique ? Etes-vous issu d’une famille de chanteurs, de musiciens ?

SG-J’ai grandi dans les montagnes ardéchoises. A la maison c’était plutôt rock, pas vraiment classique, même si dans la famille mon père et mes grands parents timbraient naturellement, j’ai découvert à mon tour ce potentiel adolescent en imitant les tubes des concerts des 3 ténors, ou d’Andrea Bocelli. Cette démocratisation fut ma porte d’entrée à l’univers lyrique. Je faisais plein de sports en club ou en option au lycée (natation, rugby, tennis, VTT, escalade) mais pas vraiment une activité dans laquelle je me sentais m’épanouir . Un copain me poussait à intégrer le Conservatoire, mais du fin fond de l’Ardèche ce n’était pas gagné. C’est à 18 ans, en allant à la fac à Nîmes et Montpellier que je me suis présenté au Conservatoire de Nîmes, dans la classe de Daniel Salas accompagnée par Christine Eyraud, je n’oublierai jamais ce moment. Pour moi c’était déjà comme arriver à New York, et là, en plus, le coup foudre avec mon premier cours de chant : une révélation ! En sortant je me suis dit, ça c’est mon truc !

Q- Vous semblez particulièrement à l’aise dans les opéras de Verdi. Est-ce ceux-là que vous préférez ?

SG- Plus généralement, c’est surtout une affinité avec le répertoire romantique français et italien, mais je fonctionne surtout au coup de cœur pour un rôle. Ce que je préfère c’est surtout voir le potentiel de jeu qu’offre un personnage et sa sensibilité dans son écriture vocale.

Q- Jerusalem est assez peu souvent monté et peut-être plus compliqué que d’autres opéras pour le ténor ?

SG- La musique est très belle, mais il faut reconnaître que c’est un rôle (Gaston, comte de Béarn) difficile à interpréter. Je ne peux pas dire qu’il soit plus fatigant qu’Hoffmann ou Roméo, mais il est plus inégal. Comme souvent chez Verdi il y a des passages très intenses de tachycardie à surmonter, ou la moindre erreur sur le placement d’un son peut se payer cash. C’est un rôle qui demande de l’expérience pour rester calme, ne pas paniquer intérieurement, même si sur scène, vous incarnez scéniquement et vocalement un moment de folie intégrale !

Q- D’une façon générale appréciez-vous les « audaces » de mise en scène, ou préférez-vous que l’on respecte les auteurs ?

SG-Je ne suis pas fermé aux transpositions du moment qu’elles ont du sens et qu’elles respectent la force dramatique des personnages. C’est souvent le problème: créer un concept pour une mise en scène moi j’en ai tous les jours, mais en trouver un capable de nourrir tous les personnages, justifier avec cohérence chacune de leurs actions, donner de la force à chaque détail, c’est à cela que l’on reconnaît les grands metteurs en scène.

  • "J'AI EU LA CHANCE DE ME TROUVER
    AUX COTES D'INTERPRETES
    QUI M'ONT FAIT REVER"

Q- Vous vous trouvez fréquemment aux côtés des plus grands, n’est ce pas une belle récompense ?

SG-J’ai eu la chance de donner la réplique sur scène à des interprètes qui m’ont fait rêver : Placido Domingo, Ruggero Raimondi, Roberto Alagna, Patricia Ciofi, Sophie Koch, Ermonala Jaho, Béatrice Uria Monzon, ma première Mimi dans Bohème, Elena Kelessidi, que j’ai pu admirer à Covent Garden juste avant… Voir Luciano Pavarotti, saluer José Carreras et j’en passe ! Si l’on m’avait dit ça au début de ma carrière, je ne l’aurais pas cru et j’aurais signé même pour le dixième. J’ai conscience d’avoir eu beaucoup de chance, j’essaye de le rendre dès que possible par des interventions dans des maisons de retraite ou des écoles : si cela peut donner le sourire ou éveiller une vocation que demander de plus...!

Q- Quels sont vos projets immédiats et autres ?

SG-Actuellement à Saint Etienne pour le Roi d’Ys, je retourne ensuite chanter les dernières de Jerusalem à Bonn, puis je m’envolerai à Hong Kong pour le rôle titre de Roméo et Juliette. Les saisons prochaines seront marquées par des reprises telles que Hoffmann à Essen (Allemagne), Christian dans une création de Cyrano à Detroit (Etats-Unis) ou des prises de rôle comme Edgardo (Lucia di Lammermoor) en Allemagne en 2016, Werther en France en 2017 ou Maurizio dans Adriana Lecouvreur en 2018.

(Recueilli par Gilbert Garrouty)

La bande annonce de Jerusalem au Théâtre de Bonn
Dimanche 6 Mars 2016

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